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23 mars 2016 3 23 /03 /mars /2016 15:53

Bon ben, ça y est.

On s'y attendait vaguement tout en espérant que ça n'arrive pas.

Et on se réveille le lendemain avec un genre spécial de gueule de bois. A sec.

Même en ayant été rassuré sur l'état de ses proches et de ses lointains, ça fout quand même une sacrée claque dans la gueule.

"Ils" l'ont fait. Et nous, on ramasse nos petits bouts, et on dit bien haut que l'union fait la force. C'est notre devise, après tout. Mais l'union sacrée, elle ne dure même pas 24h.

C'est tellement bien belge, aussi, ce petit esprit tout riquiqui. Oh nous pouvons être grands, avec d'immenses qualités. Mais nous restons un pays provincial, un pays de clochers et de rideaux bien propres et de haies bien taillées. Pas parce qu'on aime ça, mais parce que ça fera enrager le voisin. Pas parce qu'on en a envie, mais qu'est-ce la belle-fille du boucher va en penser?

A peine 24h, et les cancans et les petites vilenies reprenaient de plus belle. Toutes les Madame Termol au balcon (où sommeillent encore tous les surfinias les plus moches du catalogue) à commenter l'actualité. Et vas-y que ça cause d'intégration et de renvoyer les pas intégrés chez eux...

Et là, j'ai envie de demander: et moi, je vais où?

Je vais où? Je ne suis pas intégrée.

J'aime l'art, la littérature, la musique. J'aime découvrir des choses nouvelles, des gens nouveaux. Je vais aux concerts, à la bibliothèque, je regarde Arte.

Je ne suis pas intégrée.

Quand je pars en vacances, je ne vais pas en hôtel-club all inclusive, j'aime les maisons d'hôtes dans les petits villages. J'ai horreur du scrapbooking. Mes gâteaux sont bons, mais moches. Je déteste tout ce qui est trop droit et trop ordonné.

Je ne suis pas intégrée.

Je suis une lectrice compulsive, j'essaie de comprendre les choses. J'aime la complexité et je n'ai pas peur des paradoxes.

Je ne suis pas intégrée.

Je conchie les bégonias simples, les géraniums et les surfinias. Je ne considère pas qu'une victime de viol majeure l'a bien cherché. Et tout comportement sexuel impliquant des personnes consentantes ayant atteint la majorité, s'il peut me surprendre, ne provoquera jamais chez moi de jugements à la hâte.

Je ne suis pas intégrée.

Je tente de penser le complexe, de garder la tête froide malgré mes peurs, mes craintes. Je ne pense pas que la différence soit le mal incarné. J'essaie de ne pas simplifier. J'aime les insultes désuètes et les mots de plus de 7 lettres. Je considère que défendre ma culture commence par bien la connaître.

Je ne suis pas intégrée.

Je suis intimement persuadée, en effet, que l'union fait la force. Une union par-delà les différences. Une union vraie, basée sur un dénominateur commun, tout bête: nous qui vivons ici, maintenant. Nous qui souhaitons vivre en paix, en harmonie (tu trouves ça con? c'est le même tarif!), là où la liberté des uns n'empiète pas sur celle des autres, là où la sécurité n'est pas le sécuritaire. Là où, parce que je n'ai rien à me reprocher, on n'a donc pas à me ficher, à me surveiller.

Mais m'unir avec qui? Je ne suis pas intégrée, et tout qui n'est pas intégré doit retourner chez lui. Alors je dois aller où.?

Il paraît que la Belgique, tu l'aimes ou tu la quittes. Je l'aime, pourtant. Mais, comme dans un vieux couple, je l'aime en voyant tous ses défauts: son petit esprit, ses gens aigris, ce côté province si pleine de préjugés et de contrôle social, de normes ancestrales et de traditions débiles. De rideaux amidonnés et de haies plantées au cordeau.

Malgré tout cela, je l'aime. Et je pense que notre union ferait sa force. L'union contre ceux qui nous attaquent, mais aussi l'union contre nous-même. Contre tous nos défauts et notre esprit étriqué.

Que nous serions forts, dans une telle union.

Virginie Godet (oui, c'est décousu, mais vas-y, écris un peu avec la gueule de bois, fieu!)

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30 août 2015 7 30 /08 /août /2015 10:54

Ô horreur et putréfaction!

Ô stupeur et tremblements!

Ô rage, ô désespoir!

On est envahis, on est morts, c'est fini. Ils sont venus, ils sont tous là. C'est dans le journal, ils l'ont dit à la télé, c'est donc que c'est vrai.

Qu'on n'ose plus me dire que j'incarne une pensée dominante, ma pensée est minoritaire.

Je suis envahie par 70% de trouillards égoïstes atteints du syndrome de Gilles de la Tourette. Et pourtant, en vérité je vous le dis, la Belgique ne peut pas accueillir toute la misère intellectuelle du monde! Qu'on les renvoie chez eux!

Comment ça, ils sont chez eux???? Mais pardon, pardon, ils sont chez moi! Et chaque jour ils insultent ma culture, mes valeurs.

Cette culture qu'ils veulent défendre, mais pas un pour répondre quand je leur demande "au fait, c'est quoi le 15-Août"? ( Outre des réjouissances populaires, je veux dire).

Ces valeurs d'entraide et de solidarité, ces valeurs de curiosité et d'ouverture d'esprit qu'on m'a inculquées dès le berceau. Valeurs à jamais incarnées par cette phrase qui fusait, à peine franchie la porte de la maison de ma nénène, qui qu'on soit: "tu veux une jatte?"

Je finis par vomir littéralement les approximations, l'aveuglement et le refus de se renseigner un chouïa sur le fonctionnement des institutions avant de les critiquer, sous prétexte qu'on n'est pas tous intellectuellement égaux.

Quand on est capable de faire des montages photoshopesques de chatons à paillettes sur fond de roses rouges avec des messages neuneus qui scintillent, on est capable de faire une recherche sur Google.

Et puis arrêtez de me faire saigner des yeux. Je suis certaine que vous le faites exprès.

J'invoque la convention de Geneviève, c'est de la torture!

Ici, c'est chez moi. Retournez à Spy! Ou à Goyet! Ou à Spienne! Des trucs comme ça. Y'aura du silex à tailler pour tout le monde.

Et on pourra, pépère, entrez gens de bonne composition, enfin créer un monde de Bisounours.

D'ailleurs, tu veux une jatte?

Virginie Godet (Cocotte-minute)

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14 août 2015 5 14 /08 /août /2015 08:35

Dans les pommes, il y a de la pectine.

Et la pectine, c'est une gélifiant naturel. En effet, si vous avez peur que vos confitures n'épaississent pas assez, ou si vous voulez y mettre moins de sucre, ZE solution, c'est d'y ajouter une pomme. Hé ouais.
Et si vous faites cuire trop longtemps une gelée de pommes et de poires, vous obtenez quoi? Un truc approchant le goût et la consistance du sirop de Liège. Avouez que ça troue le cul, non?

Moralité: inutile d’adjoindre de la gélatine. Ce qui fait que toute personne suivant les préceptes d'une religion ou d'un courant philosophique qui contient des prescrits alimentaires relatifs à la viande (musulmans, juifs et certains bouddhistes ou hindouistes) peut en manger. Voilà, voilà. Avouez qu'il n'y a pas de quoi casser trois pattes à un canard...

Donc, j'en suis venue à cette conclusion transcendante: les braves gens halalophobes qui ont décidé de ne plus manger de sirop Meurens n'ont jamais fait leurs confitures eux-mêmes. JCVD. Euh, CQFD...

Allons plus loin, si tout ce qui ne contient ni gélatine de porc, ni alcool est halal, ça fait beaucoup de choses à ne plus consommer. Et si les susdits braves Aduatiques, vaillants Ménapiens et autres Eburons entrés en résistance s'en tiennent à leurs résolutions, on est partis pour une belle épidémie d’embolies graisseuses et autres cirrhoses du foie. Mourir pour des idées, mais de mort lente, qu'il disait Tonton George. C'est beau l'abnégation.

Mais c'est quand même un peu con de défendre nos beaux produits du terroir en décidant de les boycotter parce des personnes de cultures différentes ont reçu la confirmation qu'elles aussi pouvaient en manger. C'est que pour nous, na! D'ailleurs, je vais arrêter de faire découvrir les cuberdons aux amis venus d'ailleurs pour visiter Liège, ils ne les méritent pas. Bien fait pour leur gueule!

Avouez que ce serait dommage, n'est-ce pas? Dommage de ne pas partager ce qui se fait de bon et de beau chez nous, le savoir-faire des artisans, ces recettes fruits de centaines d'années d'histoire, de la lente maturation d'une idée autour de ce que nos terroirs produisent, pommes, poires et scoubidous-bidous...

Aimer d'où l'on vient, c'est vouloir en garder les trésors juste pour soi ou avoir à cœur de les partager?

Virginie Godet (Confiturologue en culottes courtes)

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17 juin 2015 3 17 /06 /juin /2015 13:47

Waterloo, 18 juin 1815-18 juin 2015.

Commémoration d'une grosse boucherie internationale, grand raout mondain, reconstitution pharaonique (enfin, impériale).

On pensera ce que l'on veut de cette débauche de moyens, tout comme chacun aura son opinion sur Napoléon, sa vie, son oeuvre. Je le trouve personnellement bien moins intéressant que Charlemagne, question de goûts. Et puis tout cet encensement - ou cette détestation totale, autour d'un personnage et d'une époque, infiniment plus complexes, manque de cette nuance si nécessaire en Histoire.

Mais là n'est pas la question dans ce billet. La question a été soulevée par cette réflexion lue sur ces gens qui "vont faire les guignols dans les champs et dans la boue". Les reconstitutionnalistes, donc, dont je me sens assez proche en tant que pratiquante du jeu de rôles grandeur nature. Proche, mais pas pareille, puisque ma pratique leur ferait lever les yeux au ciel et sortir ce cri du cœur: "C'est pas histo!" (rendez-vous compte, j'ai des robes en panne de velours, quelle horreur!)

Non, ce que je fais n'est pas histo, mais cela revient aussi à faire le guignol dans un certain inconfort, dans les champs, sous le cagnard, et parfois dans la boue. Pour s'amuser. Ridicule? Boh, j'ai des cousines qui font du scrapbooking et vont en vacances en all-inclusive à Antalya dans un hôtel estampillé "fréquenté par des Belges", et pour moi c'est ça, l'antichambre de l'enfer...

Bref, je ne comprends pas ce mépris, sans doute fruit d'une certaine incompréhension devant un loisir à la marge, bien loin des sentiers battus. Cependant, pour moi, il un grand mérite et s'approche en cela de l'archéologie expérimentale: il permet une appréhension directe du vécu des participants à ces batailles, à ces campagnes. Le bruit, la poussière, l'odeur de la poudre, la marche au pas par n'importe quel temps dans une tenue invariable, ce drap de laine qui gratte, le col officier qui vous scie le cou, les bottes cloutées malgré la chaleur, et s'il pleut, marcher dans la gadoue jusqu'au genou. Expérimenter le manque de sommeil, la charge malgré la fatigue...

Le tout, bien entendu, sans aller jusqu'à la mort ou l'amputation sans anesthésie bouclée en 8 minutes, oui, cela permet de réaliser. De réaliser sans doute mieux que les gens qui critiquent et se sont contentés de lire - ce qui est ma foi déjà bien, dans ces temps où l'incultance dépasse l'entendure. Certes, le pas n'est pas franchissable par tous, mais est-ce bien nécessaire de les considérer avec tant de mépris?

Méprisables les artisans de Guédelon qui reconstruisent un château médiéval en utilisant les techniques originelles? Eux savent pourtant, pour l'avoir expérimenté, ce que cela fait de passer des heures dans une cage à écureuil pour monter les blocs en haut d'une tour, de forger des clous ou de tresser des toises et des toises de cordes de chanvre.

Tout qui a déjà endossé une armure comprend comment les armées médiévales ont toutes fini par aller s'embourber quelque part, perdant en mobilité ce qu'elles avaient gagné en protection. Et à quel point, sous un soleil de plomb, l'insolation et la déshydratation sont là, qui guettent.

Au delà de l'apprentissage purement intellectuel, la reconstitution est donc une expérimentation directe, dans sa chair, de certains vécus, de certains ressentis. Et permet sans doute aussi cette fameuse compréhension plus nuancée...

Et s'il y a en plus de la bière et des pains-saucisses, ma foi, où est le mal? C'est assez histo, tout bien pesé.

N'en déplaise aux esprits étriqués, prompts à distribuer bons et mauvais points sans aucune connaissance de cause, il me semble à moi que ces"guignols dans les champs et dans la boue" comprennent bien plus intimement ce qu'ont vécu les soldats des armées française, autrichienne, russe ou anglaise qu'eux ne le pourront jamais, malgré tout le savoir livresque accumulé.

Virginie Godet (aimerait toutefois que les reconstitutionnalistes med arrêtent de se faire appeler "médiévistes"... Les médiévistes, ce sont les gens comme elle qui ont pondu des mémoires sur des sujets "sooooo Paladru" 3:) )

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9 juin 2015 2 09 /06 /juin /2015 09:37

Hier, à la télé, y'avait pas foot. Donc j'ai pu profiter de l'infernale lucarne, abattre une main impérieuse sur ce redoutable objet de pouvoir qu'est la télécommande et enfin regarder un film que j'aurais aimé voir à sa sortie: Perfect Mothers, d'Anne Fontaine.

Les relations amoureuses quand la différence d'âge est au désavantage de la femme sont rarement évoquées au cinéma. Enfin, en ce qui concerne le cinéma ayant pignon sur rue. Parce que, bon, tapez "cougar" ou "MILF" (mother i'd like to fuck) dans votre moteur de recherche préféré, là, vous allez trouver. C'est somme toute un fantasme assez commun.Mais, du coup, comme c'est relégué au stade de lieu commun de la pornographie, c'est à se demander si ce genre de relations n'est pas encore perçu comme quelque chose d'un peu sale, de vaguement honteux, et limité à la seule approche sexuelle. De sentiments dans cette affaire, point question. Mais pourquoi donc? Idem, par ailleurs, dans les séries télévisées: quand Gabrielle Solis, femme au foyer désespérée, jette son dévolu sur le jardinier, c'est avant tout pour occuper sa solitude et son désœuvrement. Ce qui est d'un romantisme absolument échevelé.

Bref, j'ai regardé Perfect Mothers, puisque - enfin! On traitait du sujet dans un film "tous publics ou peu s'en faut". Et pas sous l'angle de la comédie. Mouais... Le hic est que le sujet est biaisé et pose une question morale qui ne serait pas posée si le jeune homme avait été, je ne sais pas moi... Un jeune collègue de bureau, un instituteur ou un prof fraîchement diplômé, un gars qui est bénévole dans une même association, militant dans un même parti, membre d'un même club de lecture, que sais-je? Non, il s'agissait pour chacune de succomber au fils de sa meilleure amie. Le gars que tu connais depuis qu'il est tout petit, donc. Touchy, quand même. S'il n'est pas question d'inceste formellement parlant, ça me dérangeait quand même un peu sur les bords. Encore qu'en y réfléchissant bien, c'est un grand classique littéraire, le "déniaisage par une amie de sa mère" (Et que dans le sens inverse, nettement mieux accepté socialement, je vous rappelle que dans Le Bossu, Lagardère épouse Aurore de Nevers, alors qu'il l'a élevée, et ça ne fait tiquer personne).

Enfin, si on passe par-delà ce petit côté légèrement malsain (parce que, bon, c'est quand même un film d'Anne Fontaine), on retombe dans tous les travers des drames à base de "cougars" qui émaillent la littérature. Lil' et Roz, comme Madame-de-Rénal-du-Rouge-et-du-Noir-de-Stendhal, comme Léa-de-Chéri-de-Colette se prennent la tête et souffrent mille morts parce que cette situation n'est pas normale. Parce qu'elles sont "vieilles", parce qu'elle doivent en toute bonne logique devenir bientôt grand-mères. Scènes terribles où, alors que Xavier Samuel (Ian, le fils de Lil') caresse le corps absolument splendide de Robin Wright (Roz, donc), elle lui dit "Bientôt, je ne te laisserai plus faire ça en plein jour", où Naomi Watts, délaissée par son jeune amant au profit d'une brunette d'une fadeur que c'est juste pas possible, se regarde démaquillée dans le miroir et, on a l'âge qu'on a, certes, ça flanche un peu, ça perd en élasticité - ce qui ne l'empêche pas de rester fort belle.

Le fond de l'histoire, de cette inacceptation, ou en tout cas mal-acceptation de la différence d'âge "inversée", ne serait-il pas là-dedans? La femme mure peut à la rigueur être une initiatrice, mais on ne peut pas envisager avec elle une relation à long terme parce qu'elle a une date de péremption! Parce que son corps, son visage perdent en élasticité - ou pas- et qu'aussi belle soit-elle, elle est moins présentable en tant que femme-trophée. Parce que la ménopause arrivera tôt ou tard et qu'il ne sera plus temps de se reproduire. Tout cela repose donc sur des valeurs éminemment patriarcales et une vision du couple à l'avenant. Comme si ensemble on ne pouvait pas faire autre chose que des enfants. Vivre, créer, apprendre, voyager, se passionner. Comme si une relation amoureuse n'avait pour seule base que le physique, alors qu'on peut avoir des passions, des colères, des intérêts communs. Comme si ce n'était pas ça le plus important, cette infinie gymnastique de deux esprits qui cabriolent de concert et se soutiennent et s'affrontent tour à tour. Quelle importance alors que la femme approche de la date fatidique où elle ne sera plus pondeuse?

Parce que, je vous spoile comme une grosse laide, à la fin, les jeunes blancs-becs, malgré une tentative de retour à une situation normale et socialement acceptable -à l'initiative de Roz' qui a des tas de scrupules... Eh bien, ces blancs-becs, devenus plus hommes et plus mûrs, ayant pris un peu de plomb dans le cervelle, avec qui sont-ils, à votre avis?

Virginie Godet (Socio-cinéphile féministe, ce qui aggrave son cas)

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8 janvier 2015 4 08 /01 /janvier /2015 15:47

Lorsque se produit un événement qui nous bouleverse, il y a toujours un avant et un après.

Il y a toujours un jour d'après, celui de la digestion. Celui où on est encore dans l'émotion, et où le morceau doit passer. Le jour d'après, c'est celui d'avant la réflexion.

On se sent encore tout désemparé, ou triste, ou en colère. Les trois, sans doute. Il faut se lever et affronter la vie, la vraie, et les vrais gens.

Je me souviens de la mort de Gainsbourg. J'avais 15 ans. J'arrive aux cours, en larmes. J'aimais Gainsbourg depuis toujours pour ainsi dire, depuis que mon père écoutait en boucle "Aux armes, etc.", et me chantait "Eau et gaz à tous les étages", chef-d'oeuvre pipi-caca de 60 secondes. Un poète protéiforme nous avait quitté, et j'avais mal à l'âme. Quand une fille de ma classe a su pourquoi je pleurais, elle a dit: "Tant mieux, je ne l'aimais pas"... Réaction ridicule et déplacée. Mais on est con, quand on a 15 ans...

Ce matin, j'avais cours. Encore bouffée par l'émotion, à la fois triste et en colère, et pleine d'incompréhension. Une copine arrive, en larmes. Elle pleurait depuis hier.  On partage un câlin et une bonne dose de désespérance. Mais on doit avancer sur la matière. Il ne va pas se coudre tout seul, ce pantalon. Tout le monde arrive, au goutte-à-goutte (normal, vu ce temps pluvieux... le ciel aussi tirait la gueule)...

Tout allait bien, jusqu'à ce que... Jusqu'à ce qu'une d'entre nous commence à se moquer des "Je suis Charlie", commence à dire que des gens meurent tous les jours, alors 12 de plus... Et puis que les personnes qui étaient mortes l'avaient cherché aussi, un peu. Qu'elle avait bien le droit de rire de gens pathétiques qui pleuraient une bande de racistes. Non, elle n'avait jamais lu ce torchon.

Et maintenant, j'ai honte. Je ne suis pas Charlie, parce que je me suis tue. Parce que, incarnant pour cette fille le mal absolu, la blanche universitaire, la forcément privilégiée et dominante, si je l'ouvrais, les choses allaient s'envenimer. Parce que je n'ai pas envie de risquer l'exclusion pour non-respect du ROI alors que je le veux, ce certificat, ce putain de certificat!

Je ne suis pas Charlie, parce que j'ai été lâche. Je n'ai pas osé dire ce que je pensais, pour un foutu papier. Je me suis écrasée. J'ai tué la liberté d'expression. La mienne, au profit de la sienne. J'ai laissé la peur gagner.

Je ne suis pas Charlie, je n'en suis pas digne.

Oh, je pourrais rationnaliser, dire que je n'ai pas voulu argumenter parce que j'étais encore dans l'émotion. C'est mauvais pour argumenter, l'émotion, quand elle est forte. Et qu'on n'affronte pas quelqu'un qui n'a pas d'empathie - qui n'en a jamais, si ce n'est une empathie de façade- avec une émotion vraie, ça ne sert à rien. Oui, tout cela est rationnel et s'entend. Il n'empêche, je me sens laide et sale. Aussi laide et sale que cette fille qui trouvait que ces morts étaient justifiées. 

On pense ce qu'on veut de Charlie Hebdo. Moi, il a fait partie de ma vie, j'y ai été abonnée. Je pense, n'en déplaise à certains, que l'humour noir, caustique, mordant, est une délicatesse de l'âme, un paravent à une sensibilité à fleur de peau, une mise à distance de ce qui est affreux, insupportable. C'est une catharsis, un exorcisme. C'est aimer si fort l'humanité qu'on a envie de mordre quand elle vous désespère. Alors, tant qu'à mordre, autant faire bien mal par où ça passe. Et ils n'ont jamais épargné personne. Pas plus une communauté qu'une autre, pas plus une religion qu'une autre, pas plus une couleur politique qu'une autre. J'ai lu quelque par qu'ils "tapaient à l'aveugle comme des sourds", la formule est heureuse, je la reprends.

Taper à l'aveugle comme une sourde. Je n'en ai pas eu le courage. Je m'en veux, terriblement. Je ne suis pas Charlie, parce que je ne leur arriverai jamais à la cheville.

 

Virginie Godet.

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3 décembre 2014 3 03 /12 /décembre /2014 09:51

Donc, il y a de celà deux ans, de braves citoyens se prenaient des vapeurs parce que le sapin de la Grand Place était remplacé par un sapin artificiel (alors que le plastique, c'est fantastique). C'était la bronca parce que forcément, c'était rien que la faute aux vilains musulmans, qui n'ont bien entendu que ça à foutre, de faire changer le vrai sapin par un faux que même qu'on pouvait monter dedans, en payant une entrée qui serait reversée au Samu Social. Quel scandale, on n'est plus chez nous, pensez aux SDF! (Et qu'est-ce qu'il fait, le SAMU social, à ton avis, patate?). 

On a eu beau chanter sur tous les tons que non, le sapin n'est pas un symbole religieux, et que c'est une tradition allemande, alsacienne, arrivée après la guerre de '14-'18, rien n'y faisait. Les vilains designers alsaciens qui avaient créé ce sapin cubique n'étaient que des collabos à la solde des Sarrazins qui allaient égorger nos fils et nos compagnes, vite, nécro-animons Chalres Martel et sauvons la dinde! (Pour rappel, autant le sapin est d'Alsace, autant la dinde vient d'Amérique, plus interculturel que Noël, tu meurs!)

Cette année, mes biens chers frères, mes bien chères soeurs, ça y est, on s'est vraiment attaqué au symbole religieux, la crèche!

Quoi? On l'a détruite? Elle a été supprimée pour cause de "neutralité-soi-disant-mais-notre-identité-de-vrais-Belges-c'est-d'être-chrétiens-Madame!"

Non, non, elle est toujours-là. Les mannequins ont juste été un peu bousculés, pas abîmés, et on y avait accroché une banderole. Voilà. Tout est déjà rentré dans l'ordre. Juste un épisode, mais qui déclenche des commentaires qui me font dresser, une fois de plus les cheveux sur la tête.

Bordel à queue, messieurs-dames, la première chose à faire, quand on veut défendre sa culture, c'est quand même de la connaître! Je ne vous demande pas de faire la différence entre Ascension et Assomption, là, ni de me faire une thèse sur la dormition de la Vierge, encore moins sur l'Immaculée Conception. Juste de comprendre que, non, forcément, les activistes qui sont allées "expulser une famille de pauvres réfugiés" ne pouvaient pas le faire dans une synagogue ou dans une mosquée, forcément. La crèche n'existe que dans la tradition chrétienne, c'est un fait. MAIS, ce n'est pas en tant que représentation de la religion chrétienne qu'elle a été utilisée. Jésus, Marie et Joseph ont été considérés pour ce qu'ils sont dans les textes évangéliques relatifs à la Nativité: une famille pauvre, déplacée. Afin de se faire recenser, Marie et Joseph doivent se rendre dans la ville d'origine de sa famille à lui. Une fois qu'ils y sont, plus de place pour se loger, et elle doit accoucher. Une seule solution, squatter une étable.

Marie, Joseph et Jésus, ce sont des squatteurs. Et pour arranger le tout, Hérode voulant se débarrasser du futur potentiel roi des juifs, et donnant l'ordre de tuer tous les petits garçons nés dans les deux dernières années à Bethléem, ce qu'on appelle le massacre des Innocents (célébré le 28 décembre... Vous savez, le jour où vous souhaitez une bonne fête à vos copains un peu cons?), ils se voient obligés de fuir en Egypte. Keuwah? Jésus pauvre et réfugié? Hé oui, Jésus pauvre et réfugié, exactement l'image nécessaire pour l'action qui a été menée. La scénarisation de la violence institutionnelle envers les plus pauvres et les plus faibles.

Rien à voir avec l'attaque d'une quelconque religion. J'irai même plus loin, moi, la sale agnostique, mais qui aime bien le message de ce petit rabbin de Nazareth, en tout cas comme il m'a été présenté (Et chez nous, c'était plutôt théologie de la libération)... Je crois que c'est une exaltation des valeurs christiques. En passant par le mode ironique, les activistes du collectif anonyme ont remis le doigt sur ce qu'est vraiment Noël: une célébration du partage et de l'accueil du plus faible. Une exaltation de la solidarité, avec son voisin, son prochain et même son lointain.

C'est bien de remettre les choses au clair. Tant pis si ça vous choque. Tant mieux si c'est un rappel de ce que vous avez oublié, de ce que vous ignorez, ou de ce que vous avez choisi de ne pas, ne plus savoir. Noël, ce n'est pas uniquement le cava et la dinde et le concours de bite à celui qui offrira le plus beau cadeau. Ce n'est même carrément pas ça. Une peu moins de luxe, un peu plus d'amour. Et de la solidarité.

Et si vous y croyez, n'oubliez pas: "Ce que tu fais au plus petit d'entre les miens, c'est à moi que tu le fais", Mathieu, 25,40.

 

Virginie Godet (esprit du Noël présent, mon cher Ebenezer)

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7 novembre 2014 5 07 /11 /novembre /2014 13:39

Sauf un peu mal partout d'avoir beaucoup marché, et puis sauté, et puis dansé.

Et puis un peu mal à la gorge d'avoir beaucoup chanté et scandé.

Et puis surtout mal aucoeur quand je vois les infos. C'est pas la manif où j'étais, qu'on voit. Enfin, ce sont des événements regrettables, en marge, à la fin. Et c'est tout ce qu'on va retenir.

Voilà, en fait, j'ai surtout mal à ça. Au fait que les journalistes n'aient pas fait correctement leur travail. Relater la casse, bien entendu, ils devaient le faire. Mais ils n'ont parlé que de ça, pas de la grande majorité des manifestants qui, comme moi, malgré la colère qui les habite, sont restés dignes, et ont marché "dans les clous".

Ils n'ont pas dit la diversité des profils, des origines et des parcours. Je suis partie avec des ouvrières du textile, et je suis revenue avec des ouvriers communaux. En sortant de la gare du Nord, je faisais la file avec des pompiers flamands. Et des dockers. J'ai pensé "ouille", en les voyant, j'avais pas vraiment tort. Mais tout le défilé, j'étais derrière, tout derrière, quasi, j'ai pas vu ce qui se passait devant. Devant, à la fin, en marge. Et toi, devant ta télé, tu n'as vu que ça, parce que le JT n'a parlé que de ça.

Et donc, voilà que tu m'appelles. Moi aussi, je regarde le JT, et je pense "hé merde!"

Merde, ça a merdé à la fin, alors que vu d'où j'étais, c'était bien. C'était pacifique, c'était gai. Il y avait de vraies revendications, de la réflexion, du fond. En tout cas parmi celles et ceux avec qui j'ai discuté. 

Et merde, mais c'est quoi ce retour médiatique tronqué?

Du coup, je me repose la question de la presse d'opinion. Puisque l'objectivité totale est un leurre, un mythe, pourquoi ne pas, lorsqu'on relate des faits, poser d'abord ses opinions sur la table. Pourquoi ne pas dire d'abord: "telle est ma famille idéologique, je vais donc prendre position". Plutôt que de laisser croire qu'on fait un travail neutre. Il n'y a pas de travail parfaitement neutre, on regarde toujours quelque chose de quelque part. S'il n'y avait qu'une chose que j'ai retenue de mes cours de critique historique, c'est celle-là.

Alors donc, je demande, et demanderai encore, aux médias qui ont relaté ces faits en en objectant d'autres, d'assumer. Assumer les opinions qui sous-tendent leurs lignes éditoriales. Parce que c'est plus sain, plus éthique, plus déontologique. Parce que cela permet de savoir, là d'où on regarde, vers où on regarde.De savoir qui est vraiment l'émetteur, et quelle sera la teneur du message. De se rappeler, quoi qu'on s'en garde, que tout est politique, et tout est idéologie, puisque personne ne vit en-dehors du monde.

Regarde, quand j'écris, je ne cache pas que je suis de gauche, même si j'espère garder une certaine distance critique, et ne pas toujours tout prendre comme pain bénit. Il y aura forcément des thèmes qui me seront plus chers, des visions dont je me sentirai plus proche, des angles d'approche ou d'attaque qui me parleront plus. Parce que je ne vis pas en-dehors du monde, et que je sais que tout est politique, tout est idéologie. Même le PQ. Même l'amour... Jamais je ne pourrais aimer un mec de droite. Enfin, tu comprends?

Donc, voilà, maman, je suis bien rentrée, je vais bien. J'ai un peu mal partout, mais ça, je le savais à l'avance.

C'est surtout le mal au coeur qui a du mal à passer. Je voudrais des réponses. Savoir ce qui pousse les médias, surtout les plus lus, les plus écoutés, les plus regardés, à jouer ce jeu-là. Si tout est idéologie, si tout est politique, alors, un peu d'honnêteté intellectuelle ne ferait pas de mal. Que les rédactions assument d'où elles parlent, et nous saurons comment les lire.

 

Virginie.

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10 septembre 2014 3 10 /09 /septembre /2014 10:02

"En bon père de famille", nous annonçait mon beau-père quand, en cadeau de mariage, il prit pour zhomme et moi des arcopar. 

 

Un petit placement pépère, et puis bon, des parts coopératives, ce qui me soulageait des scrupules de passer dans le clan des spéculateurs, chose qui me faisait plutôt mal au cul (vu que ça me dérange un peu beaucoup sur les bords et aux entournures de jouer avec la vie des gens pour assurer mes 5% de retour sur investissement). Encore que, à y regarder de plus près, c'était pas encore la folie au niveau éthique.

Bref, beau-papa nous garantissait, plein de bonnes intentions, une poire pour la soif. Et là, justement, elle aurait été la bienvenue, mais y'a plus. La crise bancaire, l'affaire Dexia sont passées par là, et les coopérateurs se trouvent grosjean comme devant.

On attend. Depuis 2008, on attend... Force est de reconnaître que ça a fait nettement moins de bruit que les petits actionnaires de Fortis. Remarquez, si c'est pour me faire défendre par Modri, je préfère éviter (parce que dans la série "j'ai mal au cul", là c'était fini de m'asseoir pendant au moins trois semaines, brrrr).

Si on veut des nouvelles à la source, on a droit à un communiqué un peu sec de chez Belfius (qui nous annonce en gros que ça avance, mais pas vite), ou aux tergiversations du CDnV dans les négociations futures-gouvernementales. Bah oui, Kris Peeters renonce au 16 de peur de se prendre les coopérateurs flamands proches de l'ACV (la cousine flamande de la CSC) sur le râble. Les coopérateurs francophones? C'est comme les fourmis-de-18-mètres-avec-un-chapeau-sur-la-tête: ça n'existe pas, ça n'existe pas. Or, d'après le communiqué de la susdite banque, qui est bien urbaine d'essayer de rassurer les peyots qui ne sont même plus ses actionnaires, les dossiers néerlandophones et francophones, d'abord examinés séparément, ont été rassemblés par la Cour Constitutionnelle. Trop aimable. Jugement? Sine die... Voilà, voilà...

On nous informe aussi des grandes déclarations matamoresques de Koen Geens qui annonce qu'il ne se laissera pas faire, et que même si on lui dit qu'il ne peut pas indemniser, il le fera quand même. Bien, on attend de pied ferme. En espérant que ce ne sera pas "les gros d'abord, les petits après"...

 

Et je me dis que toutes ces considérations de petits épargnants doivent passer au-dessus de la tête de bien des gens encore plus dans la merde. Les bientôt virés du chômage, pour cause de "tu cherches pas assez un boulot qui n'existe pas", ceux qu'on va mettre au taf de force pour mériter les allocations (mais, si ce boulot-là existe, pourquoi on ne les engage pas avec un vrai contrat et tout?), les gens émargeant au CPAS... C'est clair de chez clair, eux vont en baver bien plus que moi. Et je me sens un rien égoïste de réclamer mes petits sous.

Mais prout! Tu te trouves une voie, enfin, tu veux ouvrir ton petit atelier d'artisanat , peut-être même qu'un jour, tu pourrais engager quelqu'un. Bref, tu crées ton job, peut-être un deuxième, un troisième... Et ben non, ça coince, parce que ce qui aurait pu constituer ta mise de base est parti dans les limbes...

Parti dans les limbes parce que des gens censés gérer en "bon père de famille" ont fait joujou avec l'épargnes de milliers de personnes qui leur faisaient confiance pour ne pas prendre de risques. C'est réussi. Et quand il faudra bien demander un prêt, seront-ils capables d'entendre: "Oh, mec, tu as joué avec MON fric, tu l'as perdu, alors maintenant, tu répares" ?

 

Virginie Godet (gimme my money back, rascal!)

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25 juin 2013 2 25 /06 /juin /2013 18:46

Oh pas le plus beau des petits villages.

Mais c'était le mien.

Et on le fait crever.

 

Quand on me demande pourquoi je ne suis pas socialiste, ma réponse est toute faite: parce que je viens d'Andenne.

Mais je ne viens pas vraiment d'Andenne. Je viens d'Andenelle. Mélange pas les Tilleuls et Léon Tombu, on n'est pas du même monde.

 

Nous, on zonait à la vieille écluse, et on se griffait les genoux aux ronces de la Petite France. Les vacances de neige, c'était le Pré Baudet dévalé sur des sacs à patates (ça glisse trop bien, la toile de jute). C'était bataille rangée entre ceux de Sainte Begge et de l'Athénée, et trêve le dimanche au Patro.

 

Mon village, c'étaient les gens de la poussière blanche: les carriers, les briquetiers et les pipiers, tous ces métiers qu'on a laissé s'éteindre à petit feu, parce que la crasse blanche, c'est pas de la crasse noble.

 

Mon village, c'était 15 jours de paradis en juin, quand les flonflons de la fête montaient jusqu'aux fenêtres de ma chambre. L'orgue de barbarie du galopant des Tissot, qui avait occupé la place depuis 1850, d'abord tiré par des chevaux, puis sont venues la vapeur, puis l'électricité. Les grandes balançoires qui vous donnaient des hauts le coeur. Le tir forain où on se mettait en groupe pour dézinguer les pipes, histoire de s'envoyer du mousseux tiède et vraiment dégueulasse, le cul dans la pelouse du parc, derrière l'église, avant de filer danser à l'Astérix et à la salle communale. Des vrais bals de village bien bien pourris. Mais on faisait avec ce qu'on avait, même si Capri n'en finissait pas de finir (et qu'Aline n'est toujours pas revenue).

 

Et puis les messieurs de la Place des Tilleuls en ont décidé autrement.

 

La place (Léon Tombu, donc) a été réaménagée. Exit le vieux banc qui croulait, bonjour l'escargot en bacs à fleurs. Plus moyen d'y mettre le galopant, la fête mourut de sa belle mort. Sans les Tissot, c'était plus ça.

 

Exit aussi la salle communale... l'Astérix vivote, mais c'est la "salle des cathos". Andenelle est morte. C'est un dortoir où on se fait chier.

 

Et puis... Et puis c'est à ceux de la poussière blanche qu'est fait le dernier coup de pute... La piperie, là où avaient travaillé tant de nos vieux (dont ma grand-mère paternelle), va être rasée. Elle était le dernier vestige encore debout d'un patrimoine dont la ville s'enorgueillit. Les travailleurs de la derle, l'argile si fine qui fait la porcelaine, et les pipes en terre. Les pipes en terre qu'on dézingue à 10 avant d'aller s'enfiler du mousseux tiède.

 

Tout ce qui reste va partir dans le beau Musée de la Céramique. Le musée des gens des Tilleuls. On aurait pu mettre en valeur cet artisanat un peu à part. Pas que le résultat, mais aussi le travail, le savoir-faire. Et le garder au sein de ce hameau où on le pratiquait.

 

Oui, je fais du micro-régionalisme. Oui, c'est de l'esprit de clocher. Mon clocher, c'est Saint-Pierre, l'église des pécheurs, des éclusiers et des pipiers. Pas Sainte-Begge, la collégiale des gens bien de la ville.

 

Je suis d'un village. C'est de là que je viens. Dans mon sang, ce sang si mélangé, si bien secoué, coule aussi la derle que ma Nénène façonnait.

 

Même si je n'y vis plus, je suis d'un village. Celui que ces messieurs de la Place des Tilleuls ont décidé de faire crever.

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